Les enjeux autour de l’inclusion et de l’insertion sur le marché du travail évoquent d’emblée la question des barrières à l’emploi. Nous pouvons même parler de discriminations à l’embauche lorsque les recruteurs se fondent sur des critères subjectifs n’ayant pas de rapports directs avec les compétences et les qualifications des candidats lors de la sélection.
Bien que la discrimination à l’embauche soit interdite et sanctionnée par la loi, elle est toujours un fléau bien présent sur le marché de l’emploi.
Selon l’article L1132-1 du Code du travail, les motifs qui ne peuvent être invoqués par le recruteur en vue d’écarter un candidat sont : le sexe, l’âge, l’origine, l’orientation sexuelle, les mœurs, l’identité de genre, la situation de famille ou de grossesse, les convictions religieuses et politiques, l’état de santé ainsi que d’autres raisons comptabilisant en tout pas moins de 25 motifs.
Malgré les sanctions associées, 85% des candidats disent avoir déjà ressenti des discrimination lors de leurs recrutements. Selon l’Organisation internationale du travail, les deux motifs de discrimination les plus courants sont le sexe et l’âge avec 15% des discriminations. Ensuite, viennent l’origine ou le nom de famille supposé avec 8% des motifs de discriminations, le handicap ou l’état de santé avec 2% et enfin les convictions religieuses.
Impacts des discriminations liées à l’embauche
Les discriminations liées à l’embauche impactent l’intégralité du projet professionnel des candidats. En raison des stéréotypes liés aux formations, dès le choix des formations après le baccalauréat, les femmes s’orienteraient plus vers des métiers littéraires ou dans le domaine du social. Les hommes eux seraient majoritaires dans l’ingénierie, la mécanique et l’aéronautique. Ensuite, l’accès aux stages et aux contrats d’apprentissage seraient entre autres raisons, conditionnés par d’autres motifs de discrimination notamment l’origine. Les étrangers auraient ainsi plus de difficultés à s’insérer sur le marché du travail et auraient des rémunérations inférieures. Or, la perturbation de la réalisation de ces différentes étapes a un impact sur l’avenir professionnel des candidats.
La discrimination liée au secteur d’activité et au genre
Sans surprise, la discrimination à l’embauche liée au genre est également liée aux secteurs d’activité. Hélas, être une femme ou un homme ça fait la différence quand il s’agit de candidater à certains postes en particulier. Les candidats sont ainsi victimes de stéréotypes liés aux compétences. Ainsi, hommes et femmes auraient « naturellement » des qualités différentes qui les distinguent. Lors d’une récente enquête sur les inégalités à l’embauche, une interview auprès d’un responsable des ressources humaines évoque le fait qu’il y a des métiers pour les hommes et d’autres pour les femmes. Les femmes seraient alors moins compétentes que les hommes sur certains postes et inversement. Ce concept « naturaliste » inspiré de Darwin vient des États-Unis et affirme que les hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus ! Selon ce postulat, il existe une différence de comportement et d’aptitude entre les hommes et les femmes. Selon une enquête, certains recruteurs l’affirmeraient bel et bien et seraient d’accord avec ce postulat.
Selon une étude réalisée par la Fondation des femmes, à compétences et qualifications égales, une femme qui postule à un métier typiquement masculin (construction, mécanique, chauffeur-livreur…) aura 22% moins de chance d’être retenue. Un testing réalisé par cette même structure indique que ce chiffre atteindrait même 35% pour le poste de chauffeur-livreur. Cette discrimination dans les métiers typiquement masculins serait due au stéréotype selon lequel les femmes auraient moins de force physique que les hommes. D’ailleurs, on a tous remarqué que ces métiers sont en grande partie exercés par des hommes. Entre autres raisons, la discrimination selon le genre en serait-elle la cause ? Ainsi, les femmes le savent et s’autocensurent pour certains postes. De même, les postes liés au relationnel et au contact humain sont généralement attribués aux femmes. Elles seraient en effet plus douces et détiennent naturellement des qualités relationnelles ainsi qu’une meilleure capacité d’écoute.
La discrimination liée à l’âge
Les entreprises évoluent au rythme de la société. Aujourd’hui, les entreprises sont constamment à la recherche de la performance et de la compétitivité. L’innovation est alors au cœur du développement des entreprises, ce qui les emmène à choisir des candidats plus jeunes au détriment des plus âgées. Nombreuses sont les entreprises à juger que les seniors coutent plus cher et sont peu flexibles. Ainsi, un candidat de plus de 50 ans aura trois fois moins de chance d’avoir une réponse positive comparée à candidat ayant 30 ans. C’est la raison pour laquelle les chiffres concernant le chômage des plus de 50 ans sont supérieurs à la moyenne. Loin des idées reçues, intégrer des seniors représente également de nombreux avantages. Fort d’une carrière importante, les personnes plus âgées ont en effet plus d’expériences à leur actif. Pour lutter contre cette discrimination, les pouvoirs publics ont tenté de mettre en place des dispositifs permettant de faciliter l’insertion des seniors sur le marché du travail.
La discrimination liée à l’origine
Une enquête menée auprès de DRH montre que la question de la discrimination liée aux origines reste encore taboue. Selon une étude réalisée par l’INSEE, la discrimination à l’embauche envers les personnes issues de l’immigration est de l’ordre de 40% et ce, indépendamment de l’origine. En 2019, 35,5% des plaintes de discriminations liées aux origines relevaient du secteur privé et 24,4% du secteur public. Le secteur privé est alors plus concerné. Il y aurait ainsi une défiance indifférenciée venant des recruteurs à l’égard des candidats étrangers. Selon cette même étude, dès lors qu’apparaît un signal d’aisance linguistique chez les sujets féminins, la discrimination s’envole. Une étude confirme que la discrimination selon l’origine est plus élevée dans les entreprises de grande envergure.
La discrimination physique
Selon le Défenseur des droits, l’apparence physique est devenue un des critères de discrimination à l’embauche depuis ces deux dernières décennies. En 2018, tous secteurs confondus, 2,6% des réclamations auprès du Défenseur des droits concernaient l’apparence physique. Cet organisme a reçu de nombreuses plaintes comme le refus d’un poste à un candidat dans la mesure où il est « disgracieux », ou encore le refus de certaines entreprises à confier un poste de responsabilité dû à un surpoids. Pour les candidats, l’enjeu se situe notamment dans la difficulté à fournir des preuves tangibles lorsqu’ils sont confrontés à ce type de discrimination. D’autres plaintes concernaient encore les codes vestimentaires.
Selon cette même étude, près d’un recruteur sur deux apporte un jugement sur le candidat avant même que celui n’ait eu le temps de s’exprimer verbalement. Bien que cette étude puisse choquer plus d’un, les personnes jugées « belles » percevraient un salaire de 12% plus élevées que les autres. Inversement, les personnes jugées « disgracieuses » percevraient des salaires de 11% inférieurs aux autres.
Mais alors…que faire ?
Nous ne pourrions pas parler de chaque type de discrimination tellement la liste est longue avec pas moins de 25 types de discrimination à l’embauche reconnues par les textes de loi. Toutefois, des dispositifs ont été mis en place et peuvent être mis en place pour réduire ces pratiques dans les entreprises. Malgré tout, les études montrent que les discriminations ne tendent pas à diminuer. Il faudrait ainsi agir sur d’autres volets.
- L’encrage des mentalités
Sans surprise, la discrimination à l’embauche est le résultat de l’encrage de nos mentalités ainsi que des stéréotypes que nous nous sommes inculqués. Pour pallier cela, des campagnes de sensibilisation sur l’évolution des mentalités liées aux discriminations à l’embauche ont été mises en place. Une prise de conscience collective serait en effet nécessaire pour lutter contre toute discrimination. En ce sens, des structures ont objectivé le coût des discriminations ainsi que ses conséquences dans le but d’enclencher une prise de conscience collective.
- Améliorer les recours des victimes
La discrimination à l’embauche peut encore être un sujet tabou chez de nombreux candidats. Ils sont encore trop nombreux à ne pas en parler et il est même difficile pour certains de se considérer comme tel. Il est ainsi essentiel que les victimes soient entendues à juste titre et que les recours soient facilités.
- La valorisation des entreprises engagées
Le gouvernement valorise les entreprises qui mettent en place des dispositifs permettant de lutter contre les discriminations à l’embauche. Les entreprises engagées peuvent ainsi recevoir des labels encourageant la diversité dans son équipe. Des outils ont également été élaborés afin d’aider les recruteurs à ne pas recourir à la discrimination. Des méthodes de recrutement alternatives sont ainsi proposées. À titre d’exemple, un logiciel ATS peut réaliser une présélection des candidatures à travers l’analyse des compétences ou des formations, ou encore à travers une analyse sémantique. De cette manière, les recruteurs ne vont pas s’attarder sur des détails discriminants comme la photo ou le genre et l’âge.